Eglise (3)

 

 

Question : Vous dites : le Quart Monde réalité essentielle de l’Eglise. L’appel vers Dieu est-il plus fort, parmi ces familles, que dans le monde contemporain en général ?

 
Père Joseph W. : Je ne saurais le dire, mais je peux témoigner de l’intérêt des familles dans les cités sous-prolétariennes, chaque fois qu’elles sont invitées à partager leur réflexion sur les grandes questions qu’elles se posent sur la vie et la mort, sur l’homme et sur Dieu. Aujourd’hui, je peux témoigner de leur besoin de Dieu et de l’Eglise.

La force de ce besoin m’a étonné, lorsque je me suis enfoui dans le Camp des Sans-Logis à Noisy-le-Grand. Les familles n’y avaient souvent pas de sièges ni de poêle, elles vivaient dans le dénuement le plus total. Et lorsque les gens parlaient de l’Eglise , ils en parlaient comme d’eux-mêmes : notre messe, notre curé, notre Eglise… Ils se plaignaient de ne pas être visités par les prêtres, de ne pas être à l’aise dans l’Eglise de la paroisse, comme si on leur avait enlevé leur bien. Ils protestaient comme s’ils avaient été laissés à la porte de leur propre maison.

En un mot, à les entendre parler, le droit d’être l’Eglise leur avait été nié. Pour eux, l’Eglise n’était pas une institution, elle ne faisait pas non plus partie de leur environnement. Du plus profond d’eux-mêmes, de leurs entrailles, ils se sentaient d’Eglise et ils le disaient sans détour.

Mais j’ai pris du temps à comprendre cela. Si j’ai commencé à écrire la vie quotidienne des plus pauvres, voulant faire reconnaître leur place dans l’histoire, je l’ai fait d’abord pour l’Eglise. A mon idée, l’Eglise pouvait ainsi trouver un moyen concret de se reconnaître dans une population vivante.

Les pauvres sont l’Eglise, p. 22-23.