Intervention de Marcel Le Hir, dans une paroisse de Rennes

Intervention de M. Le Hir, dans une paroisse de Rennes, au sujet du rassemblement de Diaconia, en Mai 2013, à Lourdes

 

 

Toutes les histoires commencent par une rencontre, on pourrait appeler celle-ci la genèse de la fraternité.

Pendant ce séjour à Lourdes, j’ai écouté des témoignages forts et riches. Tous avaient le visage de Jésus à travers ces récits de souffrance. on était en osmose les uns avec les autres. Pour moi, ce fut un ressourcement.

Le témoignage des gens du voyage, dit dans la cathédrale souterraine, m’a touché. Ce récit dit avec le cœur, sans honte, beaucoup de courage, a réveillé ma mémoire, ça a fait écho à une partie de ma vie, mais aussi à celle de mon beau-frère issu des gens du voyage, à son enfance.

Cette vie de nomade, cette pauvreté qu’on fait voyager en roulotte, de village en village, rejeté en dehors de ces villages, voilà ce que subit l’enfant, le rejet, le regard de l’autre qui déshabille, l’humiliation, quand on l’acceptait à l’école, c’était le fond de la classe. On leur imputait toutes les conneries, on rendait responsable l’enfant de cette misère.

Qu’est-ce qu’il en reste aujourd’hui ? C’est un homme debout, qui a fondé une famille, donné une éducation à ses enfants. Ne pratiquant pas, mais étant très croyant, un jour, au bout de trente ans de mariage, il me dit : « Tu sais Marcel, il nous manque quelque chose, à ta sœur et à moi, à notre couple, il faut que l’on se marie à l’église. » Et ce fut fait. J’ai trouvé cela très beau, cette réflexion au bout de trente ans.

Comme je le disais, ce que j’ai entendu m’a fait écho. J’ai beaucoup souffert du regard de l’autre dû au lieu où j’habitais, mais aussi les moqueries quand je faisais les poubelles, enfant, pour manger. Je n’avais pas la force de me battre, on vivait déjà dans une grande pauvreté de manque, de tristesse de voir nos parents comme cela. On accentuait cette pauvreté par le rejet, l’insulte, l’isolement.

Grâce au placement chez les religieuses, j’ai repris confiance, j’ai découvert un autre monde, ce fut ma rencontre avec Dieu. Bien sûr, c’était par obligation, la messe, les vêpres, la prière le soir dans le dortoir à genoux au pied du lit. Mais cette éducation religieuse m’a suivi tout au long de ma vie, a donné un sens à celle-ci, m’a fait découvrir la part lumineuse de l’autre que je rencontre, a fait mûrir en moi le besoin de servir cet autre. J’ai compris que c’est à travers celui-ci que je rencontre Jésus.

Pour moi ce séjour à Lourdes est une vraie piqûre de rappel, et qu’il faut revenir en arrière dans ses propres pas pour se remettre en face de ses responsabilités, mais aussi devant Dieu.

Aujourd’hui, les pauvres ce sont ceux des bas quartiers, comme un peu la cour des miracles, c’est ceux qu’on refoule aux périphéries des villes, dans les cités dortoirs, mis dans des logements délabrés, ou encore isolés au fond de nos campagnes.

Allons-y car c’est là que se trouve le service, c’est là que se trouve le visage du Christ. Jésus permet de dépasser nos peurs pour briser les barrières et changer notre regard dans plus de fraternité. Nous devons être des messagers pour porter celle-ci.

Se laisser transformer par les petits et les plus faibles, c’est aller à la rencontre du Christ.