Intervention de Marcel Le Hir (sept. 2014)

 

 

Intervention de Marcel Le Hir, à la paroisse Saint Augustin, à Rennes,

Comment découvrir la part lumineuse de chaque être humain lorsqu’elle est obscurcie par la désespérance et l’effroi qu’engendre une trop grande précarité ?

Mon engagement remonte à mon enfance, combattre pour manger ; j’ai souffert du regard, du rejet, que ce soit à l’école ou dans la rue. Cela a fait naître en moi de la haine, de l’agressivité, vis-à-vis de la société.

On ne demande pas à naître. Cette misère, on ne l’a pas voulue, on l’a héritée de nos parents qui eux-mêmes étaient exclus par le regard. On me rendait responsable de cette misère.

J’ai été jeté dans un monde sans douceur ni chaleur, c’est ce qu’on appelle l’exclusion sociale, et ce, dès ma naissance. Toute mon enfance fut une prison intérieure qui a comme mur l’autre qui me rejette.

Dans ces conditions, comment construire sa vie, comment devenir créateur de celle-ci ? Et bien cela est possible avec de la persévérance, de l’espoir.

J’ai puisé cette force à travers des rencontres, cette relation à l’autre par laquelle j’ai pu construire un chemin de libération de moi-même mais aussi de l’autre. Je suis devenu chercheur de vérité de l’autre, mais surtout de moi-même, me demandant : Qui suis-je ?

A partir de ce moment, j’ai pu prendre conscience qu’il n’y avait pas deux mondes, riches d’un côté et pauvres de l’autre, mais qu’on était tous des êtres humains, à la différence qu’on ne partait pas dans la vie avec les mêmes chances.

Ces rencontres m’ont permis de mieux comprendre le Dieu auquel je crois. A travers celles-ci, c’est le Christ que je rencontre. Elles m’ont permis de construire un chemin de foi qui donne force et espérance.

Mon jugement et mon regard ont changé. J’ai constaté que tout seul on ne peut rien, je me suis reconstruit à travers l’autre, je me suis laissé imprégner de son espoir, de son amour, mais aussi de ses difficultés. Mon cœur s’est ouvert, me parlant que l’avenir était devant et qu’il n’était jamais trop tard pour réussir sa vie.

J’ai compris que chacun d’entre nous peut se trouver à la croisée des chemins, même à son insu, et devenir un instant la boussole qui permet à un autre de poursuivre sa route.

Les blessés de la vie ne demandent que des rencontres d’amour, de confiance, de réconciliation, pour leur permettre de retrouver goût à la vie, une confiance qui réchauffe les cœurs, qui amène à une pacification intérieure.

Créer du lien, être connecté aux autres, pouvoir donner permet de recevoir, être à l’écoute du pauvre, c’est le faire passer de la profondeur de sa détresse à la surface de l’espérance au travers de ses idées, de ses rêves, de ses sentiments, de ses espoirs, mais aussi de ses peurs.

Dans leurs souffrances et leurs efforts, bien souvent ils espèrent un ami. Vous pouvez être cet ami, pour qu’enfin se crée une humanité riche et fière pour tout le monde.

Au travers de mon engagement à ATD Quart Monde, j’ai pu rencontrer une écoute, et surtout, pas de jugement. Je me suis fixé en priorité de rencontrer des jeunes car je reste persuadé que c’est à travers eux que l’espérance doit naître.

Cette espérance est une fleur qui pousse sur la tige du cœur. Ensemble, cultivons cette fleur dans notre jardin intérieur pour qu’elle devienne compagne sur notre route, pour que celui ou celle que vous croiserez y voie un soleil qui éclaire et réchauffe.